RESUME DE LA PLAIDOIRIE DE MAITRE SOPHIE BOTTAI

AVOCATE DE CHRISTINE DEVIERS-JONCOUR

LA RÉCATIONDE LA PRESSE:

Procès en appel le 25 novembre 2002

Maître Sophie BOTTAI avec force de conviction et d'émotion a d'abord rappelé les conditions de l'incarcération de Christine DEVIERS-JONCOUR le 7 novembre 1997, alors que le Procureur n'avait requis qu'un contrôle judiciaire, sans placement sous mandat de dépôt, et que la veille les policiers de la Financière qui avaient sonné chez elle à 6 heures du matin n'avaient eu de cesse de rechercher dans les albums photos de l'occupante du 19, rue de Lille un visage connu, c'est à dire celui de Roland DUMAS.

C'est par un premier arrêt sur image que Maître BOTTAI a rappelé qu'en 1997, l'affaire ELF commencée depuis trois ans prend une autre dimension car le Juge d'Instruction part bille en tête sur deux axes qui la conduisent directement en Afrique : avec la saisie des comptes du Président BONGO et en Allemagne : avec l'affaire LEUNA-MINOIL et la déstabilisation prévisible de la CDU et du Chancelier KHOL ; ce qui dans les deux cas est une catastrophe pour la France mais surtout pour ELF un cataclysme, ce qui par digression laisse présumer l'identité du corbeau, auteur des lettres anonymes qui vont près de deux ans focaliser l'instruction sur un Ministre d'Etat qui n'a déjà plus d'appui : Roland DUMAS.

La question n'étant pas de savoir si le Président du Conseil Constitutionnel et son environnement étaient coupable ; le projet consistant seulement à occuper pendant ce délai les juges d'instruction toutes affaires cessantes.

Après avoir à nouveau stigmatisé la faillite de l'instruction des juges plus justiciers que légalistes, Maître BOTTAI s'est attachée à restaurer l'image de Christine DEVIERS-JONCOUR, femme d'une grande dignité, qui de par son premier mariage avec un homme qui deviendra un Ministre de droite a côtoyé les élites des pouvoirs politiques, puis par son deuxième mariage avec le n° 2 de la CGR a côtoyé l'ensemble des décisionnaires industriels français, puis enfin en devenant la compagne de Roland DUMAS a côtoyé le gotha de la diplomatie française et étrangère.

Que c'est ainsi, munie d'un véritable carnet d'adresse qu'elle a été embauchée par Alfred SIRVEN, n° 2 d'ELF.

Maître BOTTAI a très longuement rappelé l'activité d'ambassadrice confidentielle entre ELF et le Quai d'Orsay qui lui a été assigné, ainsi que son rôle à l'étranger aux côtés d'Alfred SIRVEN en rappelant qu'en la recevant, c'était une "certaine France" que les Chefs d'Etat recevaient.

Que c'est dans ces conditions qu'ayant minutieusement rappelé tous les témoignages corroborant son activité que l'avocate a plaidé la relaxe de Christine DEVIERS-JONCOUR écartant toute suspicion de travail fictif.

Dénonçant à nouveau un dossier tronqué et saucissonné, Maître BOTTAI s'est attachée à stigmatiser un dossier amputé de sa tête, à savoir l'affaire des Frégates, car c'est dans ce dossier des Frégates, actuellement instruit par le Juge VAN RUYMBEKE que se trouve la preuve formelle du droit à commissions de Christine DEVIERS-JONCOUR , dénonçant ainsi l'artifice de l'apparence de la création d'un ABS, sans que sa cliente ne puisse ainsi bénéficier d'un procès équitable au sens de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

N'hésitant pas à citer les propos de Madame FULGERAS, ancien Chef du Parquet Financier de PARIS, qui trouvait également scandaleux que le fait que l'affaire des Frégates n'ait pas été jointe à cette affaire d'alcôve Christine DEVIERS-JONCOUR/Roland DUMAS.

Maître BOTTAI rappela ce que Christine DEVIERS-JONCOUR avait toujours dénoncé, à savoir le versement par Monsieur GOMEZ, Président de THOMSON de commissions d'un montant de 5 Milliards de Francs à deux réseaux fictifs taiwanais, Lily Liu et Wang, intermédiaires avec l'Etat taiwanais, qui pourtant n'avait pas besoin d'être corrompu, puisque demandeur de ce contrat des Frégates !

Que la trace de ces commissions a été retrouvée par la saisie des comptes de Wang mais que le Juge VAN RUYMBEKE se voit opposer le secret défense national à toutes les questions ainsi posées.

Ce secret défense national apparaissant ainsi au fil des jours davantage commandé par la protection d'intérêts politiques strictement privés et non légitimés par de quelconques secrets civils et militaires, susceptibles de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation à l'étranger.

Maître BOTTAI démontrant ainsi par la production de documents qui avaient été fournis à l'audience par le Ministre que le contrat des Frégates était au départ un contrat purement commercial et qu'une note interne saisie à la société THOMSON démontrait que le réseau n° 3, c'est à dire le réseau ELF (Alfred SIRVEN /Christine DEVIERS-JONCOUR) avait été parfaitement efficace, puisque le but final avait été atteint, puisque la vente des Frégates avait eu lieu.

Enfin, l'avocate rapporta la preuve indiscutable de ce que Monsieur GOMEZ connaissait bien évidemment l'existence de ce réseau n° 3 (réseau ELF), puisque c'est le n° 2 de THOMSON qui l'avait signé et que le Président ne pouvait pas l'ignorer.

Qu'enfin, une procédure arbitrale avait condamné à THOMSON à payer à ce réseau le montant de la commission qui lui était due, soit 1 % du montant du marché et que c'est justement pour bloquer ce paiement que la société THOMSON avait déposé une plainte pour tentative d'escroquerie contre le réseau ELF, alors que c'est justement le dépôt de cette plainte qui pouvait s'assimiler à une manœuvre frauduleuse.

Pour Maître BOTTAI, le personnage ambigu et machiavélique de toute cette aventure est Monsieur GOMEZ dont l'image se rapproche des grands personnages sombres dont la République se souvient.

Elle sollicitera donc la relaxe pure et simple de Christine DEVIERS-JONCOUR du chef de recel d'abus de biens sociaux, puisqu'elle a démontré le droit à commissions de Christine DEVIERS-JONCOUR, son rôle dans l'affaire des Frégates et son ignorance absolue des circuits financiers qui ont été empruntés pour qu'elle puisse être payée ; soutenant enfin que c'était la première affaire financière dans laquelle quelqu'un à qui il était reproché d'avoir indûment perçu des fonds les restituait ainsi intégralement.

En conclusion, Maître BOTTAI rappellera à la Cour qu'il n'existe pas de délit de recel par présomption de connaissance de ce que fait le dirigeant social auquel est imputé l'abus de biens sociaux, sinon ce serait faire sienne "LE COMPLEXE DE PROMETHEE" (de BACHELARD) qui frappe l'homme qui veut faire mieux que les dieux ou que son Maître pour prendre sa place. Or, Christine DEVIERS-JONCOUR n'a jamais été en situation de s'accaparer le feu des dieux.

Jb

 

LE TÉLÉGRAMME

 

Procès Elf : vigoureuse contre-attaque de la défense

La défense de Roland Dumas s'est employée , hier, au dernier jour du procès Elf, à « démolir pierre par pierre » le dossier pour lequel l'ancien ministre comparaît devant le tribunal correctionnel de Paris, dénonçant « les ragots, les vilenies et les turpitudes ».

Au dernier jour du procès, M e Sophie Botta i (à gauche) , l’avocate de Christine Deviers-Joncour, a voulu recadrer le rôle de sa cliente. (Photo AFP)

Le tribunal a mis son jugement en délibéré au 30 mai.
Réclamant la relaxe de son client, M e Jean-René Farthouat a estimé que les réquisitions du procureur, qui avait réclamé , lundi , deux ans de prison ferme à l'encontre de l'ex-ministre des Affaires étrangères pour complicité et recel d'abus de biens sociaux, « ne reposaient sur le plus petit commencement de preuve ».

« Dossier poubelle »
D'une voix forte et assurée, l'avocat entame une plaidoirie de plus de deux heures par une longue introduction stigmatisant « une impression de traque », « une atmosphère difficile, lourde, délétère ». « C'est un dossier poubelle que celui que vous avez à juger », lance-t-il à l'adresse du tribunal.
Et, se tournant vers le représentant du parquet, qui avait reproché à M. Dumas d'avoir « renoncé à l'éthique et (...) au devoir d'exigence de sa fonction », l'avocat assène : « vous avez été très professeur de morale, M. le procureur de la République ».
Visage impassible, la présidente du tribunal Sophie Portier ne laisse pas transparaître la moindre émotion lorsque l'avocat s'attache à contrer, un à un, les éléments reprochés à M. Dumas.
L'intervention du ministre dans la nomination de Loïk Le Floch-Prigent à la tête d'Elf en 1989 ? « Que Mme Deviers-Joncour ait joué la mouche du coche, c'est possible. Mais cela ne prouve rien », plaide M e Farthouat, avant d'ajouter, théâtral : « Est-ce qu'on a un mépris de la chose politique tel qu'on imagine qu'elle n'est que magouille ? »

Pas de preuves
Le rôle de M. Dumas dans l'engagement de Christine Deviers-Joncour par Elf à un emploi jugé fictif par l'accusation ? « Je cherche des preuves et je n'ai pas trouvé », affirme le bâtonnier Farthouat.
Il évoque ensuite le recel reproché à son client, notamment les statuettes grecques achetées, selon l'accusation, avec l'argent d'Elf : « c'est une affaire de corne-cul. Nous sommes en présence, à la limite, d'une dette civile mais certainement pas d'un délit pénal ». Le somptueux appartement de la rue de Lille acquis 17 MF pour, selon Mme Deviers-Joncour, abriter ses amours avec l'ancien ministre ? « M. Dumas est radicalement étranger à l'opération d'achat de cet appartement qu'il n'a jamais habité », martèle l'avocat. « Vous n'êtes pas le tribunal de la morale, vous êtes le tribunal de ce dossier », conclut-il.

« Cheval de Troie »

M e Sophie Bottai, qui défend Christine Deviers-Joncour, prend alors la parole. Elle est la dernière à parler dans ce procès et ne se prive pas d'égratigner ses confrères, parfois si condescendants à son égard au cours des débats. Après avoir tout entendu, elle recadre le rôle de sa cliente. « Est-ce que si elle avait été l'égérie d'un plombier, elle aurait été embauchée par Sirven ? », interroge-t-elle.
Qui est donc Mme Deviers-Joncour ? « Un joli visage », un « Cheval de Troie », estime M e Bottai. Pour Loïk Le Floch-Prigent, « elle est le contact qui lui manque poour devenir P - dg d'Elf ». Pour Alfred Sirven, « elle est le sésame de l'intimité du ministre ». Et l'avocate d'évoquer « la quête insensée de Christine pour éblouir » Roland Dumas, et de sermonner le ministre qui lui tourne le dos en hochant les épaules : « Monsieur Dumas, si vous l'aviez tant aimée, vous auriez dû la protéger et la sortir de ce monde, parce qu'elle ne pouvait y être qu'inexorablement broyée ».
La procédure, sur l’affaire des frégates, encore à l'instruction, n'était pas au programme du tribunal. « C'est la grande faille du dossier », a estimé M e Bottai

 


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15 Mars 2001 - L'HUMA

 

Procès Elf. Fin des auditions hier après-midi.

 

 

Une audience entre tactique et technique

 

 

Alors que le conseil de Christine Deviers-Joncour a tenté une nouvelle fois de mêler le dossier des frégates au procès, l'ancien directeur financier d'Elf, Philippe Hustache, est venu témoigner de la procédure de versement des commissions. Compte rendu.

 

Le box des accusés est resté désespérément vide. L'absence d'un Alfred Sirven, même muré dans son mutisme, a cruellement marqué la journée d'audience d'hier. L'ambiance est à la lassitude et à la morosité. Recroquevillée sur le banc des prévenus, tête baissée, Christine Deviers-Joncour donne le ton, les yeux clos. Dès l'ouverture des débats, son conseil, Me Sophie Bottai, tente bien un dernier coup d'éclat. L'avocate demande que soient versées au dossier actuellement jugé par la 11e chambre du tribunal correctionnel des pièces du volet de l'affaire des frégates vendues à Taïwan en 1991, une affaire encore à l'instruction chez la juge Laurence Vichnievsky. " Le procès qui est fait à ma cliente est inéquitable. Dès le début, il lui manquait le dossier des frégates. Aujourd'hui, c'est Alfred Sirven qui lui manque beaucoup. Nous avons tous conscience que, dans ce volet, il y a les réponses à des nombreuses questions que nous nous posons. "

Sa démarche est légitime. Sophie Bottai a accès au dossier des frégates, puisque Christine Deviers-Joncour y est aussi mise en examen. Mais la procédure est stricte. Seule la juge d'instruction est autorisée à joindre ces pièces au procès. Selon le Code de procédure pénal, Laurence Vichnievsky a cinq jours pour prendre sa décision, à dater du moment où elle en reçoit la demande. Une demande envoyée par fax seulement une heure avant que Sophie Bottai n'expose sa requête devant le tribunal. En devançant un éventuel accord de la magistrate, Me Bottai s'expose à une amende de 30 000 francs. Mais elle assume et explique : " Si je passe outre ce délai de cinq jours, c'est que j'imagine qu'Alfred Sirven acceptera de revenir pour s'expliquer. " Sa requête va en effet dans le même sens que l'ancien numéro 2 d'Elf, qui refuse de s'exprimer tant que l'instruction des frégates ne sera pas clôturée.

Une position d'autant plus compréhensible que si le procès était renvoyé, Alfred Sirven pourrait sortir de prison le 6 juin prochain. En effet, selon la nouvelle loi sur la présomption d'innocence, la détention préventive ne peut pas dépasser quatre mois lorsqu'un prévenu encourt une peine de cinq ans de prison. Et c'est en toute connaissance de cause que Sirven et ses défenseurs ont vainement tenté de jouer la montre. Sophie Bottai, en souscrivant à ce même argument, abat une dernière carte. " Seul Alfred Sirven était en contact avec ma cliente, il est le seul à pouvoir confirmer sa version. " Christine Deviers-Joncour a en effet toujours déclaré que Sirven l'avait embauchée pour faire un travail de lobbying auprès de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Roland Dumas, afin de faire aboutir la vente des frégates que ce dernier refusait. Aussi, l'avocate va jusqu'à " supplier " son témoin clé de revenir au procès. Mais la position du parquet est tout aussi irrémédiable que celle de Sirven. " Depuis le départ, je dis que le dossier des frégates n'a rien à voir avec ce procès. Je n'ai pas changé d'avis ", assène le procureur Jean-Pierre Champrenault, qualifiant cette manouvre de " dilatoire ".

Trois minutes de suspension plus tard, Sophie Portier, la présidente du tribunal, statue : " Votre demande n'est pas susceptible de modifier le cours des débats. Nous allons donc maintenant essayer d'avancer et d'éclaircir le dossier. " · la barre, Philippe Hustache, ancien directeur financier d'Elf de 1985 à 1994, vient apporter un dernier témoignage requis la veille par le parquet. · charge pour lui d'expliquer comment les commissions de la compagnie pétrolière s'effectuaient. Des paiements qui passaient via la Rivunion, société anonyme basée à Genève, antenne de la direction financière d'Elf Aquitaine. " C'était le poumon financier du groupe, explique Philippe Hustache. Les ordres étaient donnés par téléphone avec enregistrement, soit par le directeur comptable, soit par moi-même. " Sans trace écrite en France. Seul un relevé émanant de la direction générale des douanes recensait les opérations. Un état vérifié tous les trimestres par les services comptables d'Elf. Une fois le virement effectué, il était remboursé par Elf à la Rivunion. Si les ordres de virement pouvaient être demandés par n'importe quel directeur opérationnel, il fallait obligatoirement une signature. Celle du président-directeur général de l'époque : Loïk Le Floch-Prigent. Cette déposition vient largement contredire les déclarations de l'ancien PDG, qui a toujours nié avoir été au courant des deux versements de 14 et 45 millions de francs faits à Christine Deviers-Joncour. Réquisitoire lundi.

Sophie Bouniot