Episode I:
R Dumas: Me JR Fartouat sans bottines de cornecul ! puis M Lantourne 7 fois sa langue dans sa bouche pour parler de Loïk Le Floch-pigeon !
Peut-on encore parler d'un procès Dumas ? La question est posée depuis le réquisitoire modéré de l'avocat général, Marc Guirimand, devant la cour d'appel de Paris.
| |||
Voilà pour "l'atmosphère". Quant au fond, l'avocat de l'ancien ministre a méthodiquement mis en pièces des charges déjà fragilisées par l'accusation elle-même. Le chef de "complicité d'abus de biens sociaux"n'ayant pas été retenu par le jugement de première instance, c'est celui de "recel"que Me Farthouat s'est employé à écarter : Les bottines ? "Une histoire de cornecul !". Les statuettes ? "C'est un cadeau. Quand elle les lui offre, il aurait donc fallu qu'il lui demande : avec quoi les as-tu payées ma chérie ?"
L'avocat de M. Dumas se montre tout aussi ironique à propos de l'affirmation selon laquelle son client aurait tiré profit du train de vie de sa maîtresse et surtout de son appartement de la rue de Lille, payé avec les commissions versées par Elf. "C'est une délinquance de proximité qui est reprochée à M. Dumas !", tonne-t-il. Mais Me Farthouat le sait, la partie sur ce point est loin d'être gagnée devant la cour et il ne peut se contenter d'ironie.
"LE NOM DE SON CHIEN"
L'avocat de Roland Dumas règle donc quelques comptes. Avec Christine Deviers-Joncour d'abord, qui "prend parfois quelques distances avec la vérité". Il évoque notamment des frais acquittés avec la Carte bleue d'Elf et dont elle a dit qu'ils correspondaient à des voyages en compagnie de M. Dumas, notamment à New York. "M. Dumas était bien à New York à ces dates, mais à des assemblées générales de l'ONU. Et je ne pense pas que le ministre des affaires étrangères de la France ait besoin de Christine Deviers-Joncour pour aller à New York, dormir à New York, manger à New York", observe Me Farthouat.
Encore plus acide, il remarque que certaines de ces dépenses sont faites en Floride - à "Oualte Disnai, précise-t-il... alors que M. Dumas n'y a jamais mis les pieds !". Au nom de son client, Me Farthouat réserve aussi quelques petites banderilles à l'"autre" amant de Mme Deviers-Joncour, Gilbert Miara. "Qui donne le nom de son chien au compte bancaire par lequel transitent les commissions ? Qui choisit l'agent immobilier, le notaire, la décoration pour l'appartement de la rue de Lille ? Mais c'est notre excellent ami, notre voisin de banc, Gilbert Miara !", observe-t-il sous le regard approbateur de Roland Dumas, tandis que Christine Deviers-Joncour, blessée par les mots de l'avocat, se cache le visage dans ses mains.
De l'autre côté du prétoire, Loïk Le Floch-Prigent n'a rien perdu de la plaidoirie de Me Farthouat. Car, pour l'ex-PDG d'Elf, la ligne de défense est claire : s'il figure parmi les prévenus dans cette affaire, c'est uniquement parce que l'instruction avait besoin d'un dirigeant pour tenir tout le dossier de l'abus de bien social. "C'est Loïk Le Floch-pigeon !", s'exclame son avocat, Me Maurice Lantourne. "Sans dirigeant, il n'y a pas d'abus de bien social, donc pas de complice, donc pas de receleurs, donc pas Dumas. Et tout s'écroule !" Une piste qui a d'ailleurs été suggérée par l'avocat général et qui n'est sans doute pas étrangère à la modération de la peine qu'il a requise contre M. Le Floch-Prigent : trente mois d'emprisonnement avec sursis. "Vous n'êtes pas condamnée, Madame la présidente, à rattraper les erreurs d'une procédure", remarque-t-il, en demandant la relaxe pour son client, qui a été condamné à trois ans et demi de prison en première instance. Avec son confrère, Me Philippe Pétillault, il insiste. Si cette relaxe devait en entraîner d'autres, "ce ne serait pas un drame. Il n'y a pas de dossier emblématique".
Pascale Robert-Diard